Débat sur la transition énergétique. Propositions de la FSU PACA

L’efficacité énergétique (synonyme de sobriété énergétique) doit être améliorée. Il s’agit de la première étape de la transition énergétique qui permettra de desserrer l’étau des énergies fossiles en Europe et dans le Monde. Parce qu’il a été la première zone industrialisée dans le Monde, le « vieux continent » est désormais quasiment dépourvu de toute ressource en énergie fossile et en matière première minières (comme par exemple l’Uranium en France). Presque tout ce qu’il consomme est désormais importé de l’extérieur. Rappelons que les importations en énergies fossiles et en matières premières minières ont représentés en 2011 environ 4% du PIB de l’Union Européenne (61 milliards d’euros pour la France représentant 88% du déficit commercial de la France). Rappelons aussi que la première ressource énergétique que l’on possède est celle que l’on n’utilise pas : il y a là un gisement d’énergie considérable dans les bâtiments, les transports, l’industrie. Il faut réduire là les consommations d’énergie : par exemple les bâtiments représentent 44% de la consommation totale d’énergie et 20% des émissions de Gaz à effet de serre.

Ainsi, avant même de penser à produire autrement de l’énergie, il faut penser à mettre fin au gaspillage. Ce n’est qu’une fois étudié le potentiel d’économie d’énergie qu’on devra se poser la question du bouquet, du mix énergétique et donc des sources d’énergie pour répondre aux besoins restants. Mais surtout ne pas raisonner en sens inverse comme ce fut le cas jusqu’à maintenant. Il s’agit donc de rénover l’habitat (isolation massive et rénovation thermique du parc existant, pompes à chaleur…), développer des transports collectifs moins polluants et plus sobres en énergie, dissuader les consommations superflues et revoir l’ensemble de notre politique de la ville en cessant de séparer les zones d’emploi et de services, des zones d’habitation.

Ces ambitions nécessitent une véritable politique publique d’investissements. Ceux-ci doivent être massifs, cordonnés à tous les niveaux territoriaux, et permettre que la nécessaire transition énergétique pèse peu sur le pouvoir d’achat de la population, notamment aux revenus modestes.

Bâtiment :

En moyenne, un logement français consomme 180 kW/m2/an pour le seul chauffage contre 140 kW/m2/an en Allemagne. On peut donc faire beaucoup mieux. L’objectif du Grenelle était de diviser par 4 cette consommation d’ici 2050. Beaucoup de logements ont été construits pendant les « 30 glorieuses » sans se préoccuper de l’isolation . C’étaient de véritables passoires thermiques chauffées au fioul du temps où le pétrole était bon marché Ces logements sont devenus ensuite massivement consommateurs d’électricité avec le programme nucléaire des années 80 : 31% des logements actuels sont chauffés à l’électricité alors qu’il s’agit du moyen de chauffage le plus inefficace.

Le renouvellement actuel du parc de logement est trop lent avec 1,2% de constructions neuves par an. L’urgence porte donc sur la rénovation du parc existant (le plan d’action annoncé par le gouvernement actuel concerne la rénovation de 600 000 logements anciens/an). Pour les bâtiments neufs, on peut concevoir des bâtiments plus performants avec une consommation d’énergie qui n’excède pas 50 kW/m2/an, niveau équivalent au label Bâtiment Basse Consommation (BBC) (en juillet 2011 : 13 530 logements étaient labellisés BBC et 220 000 constructions en cours). Bien évidemment, le plus ambitieux serait d’imaginer des maisons à énergie positive équipées de panneaux photovoltaïques (ce solaire photovoltaïque dit de toiture, pour lequel des incitations sont nécessaires, devraient correspondre à 2,5 m2 installés par habitant en 2020 et 9,3 m2 en 2050 selon le rythme d’installation en PACA : c’est moins de la moitié du rythme allemand) ou dotées de chaudières à cogénération : ce sont des maisons qui produisent plus d’énergie qu’elles n’en consomment. De plus, l’isolation thermique des bâtiments doit permettre l’utilisation de matériaux de construction (isolants, etc…) qui ne nécessite pas beaucoup d’énergie pour leurs fabrications : isolants naturels industriels (laine de chanvre, fibre de bois…) ou isolants bruts (copeaux de bois ou paille…). Cette rénovation thermique des bâtiments doit donc être mise en œuvre à grande échelle et rapidement. Dans le scénario Negawatt PACA, les réductions de consommations d’énergie finale dans les bâtiments sont de l’ordre de 55% entre 2007 et 2050. De plus, ce programme de rénovation, serait une source d’emplois non dé localisables, ce qui vu le chômage dans notre région, ne pourrait être que positif.

Efficacité énergétique :

Dans la même idée , la tarification progressive de l’électricité et du gaz a comme objectif de garantir l’accès de tous à ces biens essentiels et d’inciter à une consommation responsable. Cette tarification progressive de l’électricité et du gaz installera en 2014 un bonus-malus en fonction de la consommation des ménages en gaz et électricité pour la résidence principale à partir d’un volume de consommation de base fixé en fonction de trois critères (zone géographique, composition du foyer, mode de chauffage). Nous pensons que ce dispositif ne règle ni le problème de la précarité énergétique, ni celui de l’isolation thermique de l’habitat au sens large. Donc, cette loi de tarification progressive de l’énergie au-delà d’une application qui s’avérera très difficile risque au final de pénaliser fortement les ménages modestes qui se trouvent déjà en situation de précarité énergétique. Cela encore plus dans la perspective de l’application au 01/01/2016 de la loi NOME (Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité) qui entraînera mécaniquement une hausse de 30% du tarif de l’électricité.

La vraie et première réponse consiste donc à la mise en œuvre sur le long terme d’une politique publique ambitieuse de maîtrise de la consommation avec la mise en place de plans de rénovation thermique de l’habitat (voir ci-dessus). Ces investissements publics permettront de réduire la facture énergétique des citoyens et créeront de plus des emplois. Par la suite, la FSU est favorable à ce qu’un débat s’ouvre sur la tarification progressive de l’eau, du gaz et de l’électricité et sur la gratuité des consommations de première nécessité. Cette tarification progressive doit favoriser des pratiques plus sobres mais elle ne doit pas pénaliser les foyers les plus modestes qui ne peuvent pas par exemple faire des travaux d’isolation de leur logement. Il faut de même continuer à obliger les industries à améliorer l’efficacité énergétique des appareils et équipements domestiques (Directive Européenne 2012/27/UE du 25 octobre 2012 relative à l’efficacité énergétique). Le remplacement d’ampoules classiques à incandescence par des lampes à basse consommation va dans le bon sens. Le comportement des usagers est aussi déterminant dans la lutte contre le gaspillage d’électricité. Les associations (Global Chance et Negawatt ont démontré que la suppression de la consommation inutile des ménages permettrait d’économiser la production de 3 à 4 réacteurs nucléaires dans le seul secteur résidentiel (soit de 20 à 30 TWh/an). De même on peut économiser beaucoup sur l’éclairage public (cf. expériences à Lille et Toulouse).

Transports :

En ce qui concerne les transports, il faut revoir la politique de la ville (par exemple développer les transports en communs gratuits comme à Aubagne, développer l’utilisation de véhicules propres). Rappelons qu’en ville, la voiture est utilisée dans 40% des cas pour effectuer des trajets de un à 3 km, distances pour lesquelles des alternatives existent !). Sur le plan national, le réseau ferré a été délaissé par les politiques publiques. Le réseau ferroviaire vieillissant se trouve donc en concurrence avec un réseau routier moderne. La part du rail dans le transport de marchandise est passée de 30% en 1984 à 10% en 2010. Or, il faut donc développer le fret ferroviaire pour diminuer notre consommation d’énergie et nos émissions de GES. Ce qui passe par la multiplication d’autoroutes ferroviaires et la « pénalisation » de la route avec la mise en place d’une taxe poids lourd, taxe routière kilométrique pour les camions sur tout le réseau (y compris autoroutier) et sans dérogations (ce qui n’est pas le cas de celle qui doit se mettre en place mi-2013 )(comme en Allemagne où les camions s’acquittent de la taxe selon le nombre de kilomètres). De plus il nous apparaît inconcevable que le fret ferroviaire soit soumis à un péage alors que le transport par camions n’acquitte pas les péages, surtout que cet argent ne revient pas à l’État et donc ne permet pas d’investir dans des alternatives.

Le développement de grandes lignes ferroviaires est nécessaire pour désenclaver Nice et les Alpes Maritimes et faire baisser la part du routier. Toutefois, il nous apparaît aussi nécessaire d’investir pour développer aussi les petites lignes afin que ne se développent pas des déserts ruraux en terme d’activité entre les grandes agglomérations régionales (Marseille-Aix, Toulon, Nice, Cannes, Avignon). Ainsi, le projet de la LGV de l’arc méditerranéen ne peut se faire au détriment du réseau régional.

Il faut en outre promouvoir d’autres modes de transport comme le maritime et le fluviatile (notre Région étant riche de ce point de vue par ses grands ports : Marseille, Toulon, Nice).

Utilisation des Terres et agriculture de proximité

Dans la même préoccupation de rapprocher l’usager des biens consommés pour réduire la facture énergétique, il apparaît nécessaire de privilégier une agriculture de proximité et des circuits courts. L’agriculture en région PACA est justement une agriculture de petits exploitants et diversifiée, ce qui offre l’opportunité de vente directe et de circuits courts de proximité. Il existe aussi toute une industrie agroalimentaire locale assurant la transformation sur place et permettant aussi ces circuits courts : huileries, fromageries… Il faut donc favoriser et inciter les usagers à l’utilisation des biens agricoles issus de ces circuits courts.

Il nous semble aussi pertinent de favoriser le regroupement de ces petits exploitants au sein de coopératives afin de diminuer la part des transports dans le bilan carbone et énergie des productions locales.

En termes d’utilisation des terres, le développement de l’agroforesterie semble tout indiqué : afin de produire des produits utilisables pour l’isolation (cf. Bâtiments ci-dessus) mais aussi pour lutter contre l’érosion, la sécheresse (haies…)…