Le 20 octobre, le CESER a examiné les orientations budgétaires de la Région, telles qu’elles seront présentées au vote des élus le 21 octobre. Le CESER a produit un avis sur ces orientations budgétaires. Cet avis se trouve en pièce jointe à cet article.
Cet avis pose deux lourds problèmes. Le premier est de présenter comme intangibles les politiques d’austérité à l’oeuvre pour 2012 et pour l’avenir : le rôle du CESER n’est pas de prendre fait et cause pour telle ou telle politique budgétaire nationale ou européenne. Le deuxième est de conseiller la Région à appliquer une stricte politique de l’offre et d’aide aux entreprises, aux dépens de ses compétences obligatoires, et des dépenses de fonctionnement … Toutes les organisations syndicales se sont abstenues sur cet avis du CESER et ont fait une déclaration en séance. Voici celle de la FSU.
SEANCE PLENIERE DU CESER 20 octobre 2011
Orientations budgétaires
Intervention FSU – Josiane Dragoni
Un contexte difficile
Le contexte en matière budgétaire, et tout particulièrement pour une Région, est aujourd’hui il est vrai particulièrement difficile :
Dotations de l’Etat gelés : elles diminuent en euro constants.
Difficultés voire impossibilité d’accès à l’emprunt bancaire et hausse prévisible des taux.
Il ne subsiste aucune marge en matière de fiscalité avec des recettes désormais très sensibles à la conjoncture : elles diminuent avec la baisse de la croissance.
Il faut y ajouter une réforme des CT aujourd’hui non achevée, qui laisse entière la question pourtant centrale de la répartition des compétences entre CT. Une réforme, si elle avait été démocratiquement conçue, aurait pourtant nécessité de commencer par ce sujet là ; elle aurait aussi dû traiter de la question métropolitaine en harmonie avec le fait régional, niveau pertinent des politiques publiques, plutôt qu’en contradiction.
Mais l’avis tel que proposé au vote du CESER comporte deux problèmes d’importance.
Point 1
Le premier est de présenter les choix actuels nationaux et européens en matière de politique budgétaire et financière comme intangibles, non seulement pour 2012, mais au fond sur une durée bien plus longue ( cf l 510-512 ) : Le SRADDT, enjeux à 20 ans, devrait intégrer le contexte et la crise du financement public !
Sur le fond de cette argumentation
Non seulement d’autres choix sont possibles, mais ils sont indispensables, sinon la croissance ne repartira jamais et c’est toute l’économie qui s’effondrera !
Pour nous en convaincre, lisons la lettre de l’OFCE datée du 14 octobre, au titre évocateur : « Retour en enfer ? ».
L’OFCE prévoit une croissance en 2012 à 0,8% et non 1,7% comme prévu au PLF, compte tenu des mesures d’austérité à l’œuvre.
Les mesures prises en 2008-2009 ont évité un processus dépressif comme dans les années 30, mais ont conduits « à la socialisation de dettes privées insoutenables » et « laissé les Etats lourdement déficitaires » : cette situation, l’endettement des Etats, a été provoquée non pas par des dépenses publiques « insoutenables », mais parce qu’il y a eu « socialisation des dettes privées » qui elles sont effectivement insoutenables. Faut –il rappeler que cette dette privée ( cf USA, Espagne…) a été le moyen utilisé pour compenser l’insuffisance du pouvoir d’achat des ménages ? A cause d’une répartition des richesses très déséquilibrée en défaveur du salariat ?
C’est la partie du déficit dit conjoncturel, en hausse de 22 points dans la zone Euro depuis 2007, qui entraîne à son tour la crise qu’on connaît aujourd’hui : la panique bancaire face à un possible défaut de certains Etats.
La rigueur, ou les politiques d’austérité aujourd’hui à l’œuvre (pour conserver la note triple A pour « rassurer » les marchés financiers) conduisent tout droit non seulement aux pires injustices sociales mais aussi à la récession et à la spirale infernale : tout effort de réduction des dépenses est annulé par le ralentissement de la croissance qui en résulte.
En effet, si la croissance est faible, alors le chômage augmente et la consommation baisse : le chômage, les salaires bloqués et les ménages qui épargnent pour ceux qui le peuvent se conjuguent pour faire baisser la consommation, ce qui entraîne mécaniquement la baisse de la production. Alors, les rentrées fiscales chutent, et le déficit des budgets publics continue à se creuser : c’est la spirale infernale. Même en diminuant les dépenses ou plutôt surtout en diminuant les « dépenses ». Alors le crédit devient rare et cher, ce qui est dramatique pour les entreprises, qui ne peuvent investir.
Voilà à quoi conduisent les politiques déflationnistes, ou d’austérité. Pourquoi recommencer des politiques qui vont droit dans le mur, et qu’on a déjà utilisées dans les années 30 avec les résultats économiques et politiques que l’on connaît ?
En conclusion de ce premier point :
Le rôle du CESER ne consiste pas à prendre fait et cause en faveur de telle ou telle politique budgétaire nationale ou européenne, ni à court terme et a fortiori à moyen ou long terme ! Comment imaginer qu’il serait possible de poursuivre sur cette lancée pendant 20 ans ? Ne voit-on pas l’acuité des problèmes sociaux dès aujourd’hui ? Ne voyons-nous pas la révolte ou l’explosion sociale se profiler ?
Le rôle du CESER est de conseiller la Région sur ses choix budgétaires en 2012, dans le contexte actuel.
Point 2
Et sur ce deuxième point, la FSU ne peut être en accord avec la seule voie ouverte par l’avis : donner la priorité au seul développement économique, selon une théorie économique, celle de l’offre, dont le moins qu’on puisse dire est qu’elle n’a pas fait la preuve de son efficacité depuis 30 ans, et dont le résultat est connu : la crise systémique actuelle, avec le creusement fort des inégalités facteur essentiel de la baisse de la consommation…
Ce seul choix ouvert par l’avis est d’autant plus déplacé que nous nous adressons à une Région. Or chacun sait que les compétences principales des Régions, l’essentiel de son budget concerne deux secteurs : la formation (lycée, apprentissage, FPC, enseignement supérieur), et les transports : précisons les TER (et non les routes ou la construction de voies ferrées…)
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Dans le cadre d’un budget 2012, et même s’il est contraint, la Région devrait avoir les priorités suivantes :
Ses compétences légales (formation, TER notamment) et les dépenses de fonctionnement qui vont avec, dont les agents régionaux des lycées.
L’utilisation de ses compétences en matière d’aménagement du territoire et d’économie, mais qu’est ce que cela signifie ? Il faut préciser qu’une Région n’a en ces domaines qu’un très léger budget ( ce qui est différent pour une commune ou intercommunalité par exemple ou du moins certaines d’entre elles), qu’une Région ne peut aider financièrement les entreprises qu’à la marge, que les dépenses des Régions sont essentiellement des dépenses de fonctionnement par nature, et que les dépenses d’investissements, rappelons le, peuvent être tout à fait hors compétence : citons le CEREM ou l’Université des Métiers.
Par contre les Régions peuvent essayer de mettre en synergie des politiques publiques cohérentes en matière d’infrastructures parfaitement nécessaires au tissu productif, comme la formation des Hommes, ou leurs déplacements, ou encore la solidarité sociale, sans laquelle il n’y a pas de production possible.
C’est pourquoi la FSU s’abstiendra sur cet avis. Si la FSU s’abstient, c’est parce que nous avons le souci de ne pas bloquer le fonctionnement du CESER, ni celui de la Région demain. C’est aussi parce que nous avons entendu lors du bureau des propositions constructives afin que nous explorions ensemble les moyens de fonctionner au mieux, malgré le contexte difficile.